Qadisha – Le retour

Les vacances d’avril approchent, les beaux jours font quelques timides apparitions, nos jambes nous démangent, les sacs à dos sont prêts. Il est temps de partir avaler quelques kilomètres.

Notre choix se porte sur deux sites : Jabal Moussa que nous commençons à bien connaitre et la vallée de la Qadisha, puisque c’est là que se trouve …

Elle est pas belle la coupure qui incite à cliquer sur « Lire la suite » ?

Un petit retour en arrière s’impose, puisque cet article est bien évidemment écrit et posté après les vacances.

Maroc

Notre premier projet était de partir voir des amis au Maroc. Ils ont quitté le Liban en juillet dernier et nous avions très envie de les revoir, sans compter que Petite Demoiselle avait encore plus envie de revoir le jeune camarade de classe dont elle nous parlait non-stop l’an dernier …

Sauf que depuis Beyrouth s’il est facile et peu cher de prendre l’avion pour Chypre, pour Le Caire, l’Arménie, l’Italie et quelques autres destinations (vous voyez venir les prochaines vacances ?), le Maroc (tout comme la Tunisie) sont absents de cette liste. Aucune idée sur le pourquoi du comment de la Tunisie. Pour le Maroc il semblerait que cela soit des routes aériennes complexes à mettre en place avec l’Algérie (grosses tensions entre ces deux pays). Ceci dit mes informations sont possiblement sans aucun fondement et ce sont des choix des compagnies aériennes qui sont responsables. L’important pour nous étant que si nous voulons maintenir le projet il va falloir allonger le temps de voyage (pas de vol direct) et vendre un de nos reins. Madame et moi-même refusons de charcuter Petite Demoiselle, Madame n’est pas chaude pour l’opération (et les pauses pipi en randonnée deviendraient ingérables) et j’ai déjà trop de cicatrices. Conclusion : pas de Maroc depuis le Liban, à caler un été depuis la France.

Nous décidons de profiter des longues vacances d’avril (un jour bonus au démarrage et à la fin, liés aux fêtes religieuses de plusieurs communautés nous amènent à 16 jours pleins) pour planifier un savant mélange de repos et de randonnées.

Jabal Moussa

Le premier séjour consiste en 3 jours et 2 nuits chez Murielle (notre amie qui tient un gîte proche d’une des entrées de Jabal Moussa). Cela tombe bien, le temps tourne à la pluie et nous ferons une toute petite sortie de 2 heures pour aller jusqu’au lac Chouwan. Malgré l’ondée nous ne regrettons rien, la rivière est en crue et le spectacle vaut le déplacement. Face à l’entrée de la réserve Jacqueline, charmante libanaise qui vend des man’ouchés, nous propose un souvenir comique à ajouter à notre collection : 16 dollars les trois man’ouchés avec une bouteille d’eau (Mister J, cela vaut ton café en Jordanie). Cela ne fait que deux à trois fois le tarif fort de Beyrouth centre. Quel humour ! Madame lui ayant expliqué vertement (en conservant le sourire) sont point de vue après avoir payé, Jacqueline attendra la fin de notre marche pour tenter une seconde prise de contact dans le but avoué d’une réconciliation. Peine perdue, nous ne resterons pas amis, faisons nous une raison.

Le reste du séjour chez Murielle est parfait et se résume en une alternance de cafés, infusions, repas, lecture, échanges, repos, cafés, infusions, … Vous saisissez l’idée ? C’était exactement ce qu’il nous fallait à ce moment là et ce furent deux jours d’intense bonheur tranquille (oui, j’aime les oxymores).

Retour à l’appartement, préparation de la suite entrecoupée de soirées apéros-potes.

Pour la seconde partie du voyage j’ai proposé de faire l’ascension du plut haut sommet du Liban !

Cela en jette, non ?

D’accord, c’est un petit 3000m (3088m) et surtout le départ est à la station de ski à 1900m environ. Cela reste une belle montée, mais ce n’est pas l’Himalaya. Pour tout savoir sur Qurnat as Sawda’ c’est sur wikipedia comme d’habitude.

La ville la plus proche est Bcharré, cela vous rappelle quelque chose ? C’est normal, c’est le lieu de notre virée dans la vallée de la Qadisha. Cette fois-ci nous ne dormirons pas chez Raymond puisque nous ne sommes que tous les trois.

Un recherche sur Internet et sur le site de logement bien connu, je récupère le numéro de l’heureux propriétaire et nous traitons en direct. J’adore le Liban, c’est tellement plus convivial que ces plates-formes américaines …

Peter nous recevra donc dans la petite maison qu’il vient de retaper. Le contact est bon, le jeune homme a l’air très sympathique, cela se confirmera sur site.

Jour 1

Le trajet étant long (02:30 de route, ici c’est long pour les nerfs), nous faisons un arrêt à Batroun. Nous n’étions pas venus depuis notre arrivée au Liban, et nous (re)découvrons certaines ruelles, certaines places.

Arrivée chez Peter, la maisonnette est très basique (deux chambres, une pièce à vivre, une micro-cuisine et une salle d’eau-toilette). La partie chambre est « séparée » du reste par un paravent, la micro-cuisine consiste en un évier qui supporte un brûleur gaz et un frigo non branché. Pour ceux qui ne connaissent pas cette partie du monde (cela se retrouve dans d’autres pays autour), les toilettes-salle d’eau c’est une cuvette de toilette, avec un jet de douche à côté (avec le tuyau plus long que la douchette qui se trouve parfois dans les toilettes mais dont l’usage consiste à éviter d’utiliser du papier, les évacuations dans les anciens bâtiments n’étant pas d’un diamètre suffisant).

J’entends déjà les rires de ceux qui me connaissent, faites les malins, bidonnez-vous à mes dépends !

Pourtant je ne regrette rien parce que deux éléments viennent tout compenser : la vue des deux chambres et la soubia entourée de canapés dans la pièce à vivre.

La vue de nos fenêtres de chambres

Le bruit de la cascade le soir sur la terrasse ou le matin au réveil, c’est génial.

De plus Peter s’avère aussi gentil que prévu, accueillant et disponible (et point non négligeable en cette période d’inflation de dingue avec la dollarisation de tous les secteurs, le prix est plus que correct : 40$ par nuit).

Il se fait tard, direction le meilleur restau de la ville d’après les infos glanées sur le net et surtout un des seuls ouverts à cette saison (voire en cette période de crise). Cuisine libanaise, tout à fait correcte et à des prix sans prétention. Nous en ferons notre QG pour les soirs suivants, Madame et moi éplucherons une partie de la carte, Petite Demoiselle restera sur son premier choix : burger tous les soirs (faits maison, à la demande, cela nous permet de gérer notre culpabilité de parents démissionnaires).

Jour 2

C’est le grand jour ! Sacs à dos prêts, eau, chaussures, provisions, moral, tout est au point. Direction la station de ski, et la victoire sur le sommet du Mont Liban !

La vue ne nous fait même pas peur. Les nuages gris sont loin, le ciel est bleu, la température excellente pour l’effort (16 à 18 degrés Celsius) et les quelques plaques de neige sont éparses.

Le trajet en main (enfin sur les différents accessoires du randonneur connecté… Putain le jour du ShutDown nous allons tous crever dans la première semaine) nous entamons notre périple.

Un petit chemin contourne les derniers magasins de location de ski (encore ouverts, malgré l’absence de toute voiture à part la nôtre !?!), rapidement la pente se fait plus raide en suivant le trajet des téléphériques. Arrivée assez facile à un bâtiment en ruine, accompagné de son téléphérique en ruine (la photo ci-dessus), le chemin est plus à gauche que sur l’image (photo avec portrait de famille, donc pas proposée ici).

La neige a elle aussi décidé de s’entasser sous les chemins de câbles. Qu’à cela ne tiennent, nous prendrons sur la droite, cela rallonge à peine et cela évitera les glissades.

Une heure trente plus tard, une putain de merde d’heure trente dans un pierrier à la con, à descendre d’autant que l’on monte à chaque enjambée, à faire des zigs et des zags pour limiter cet effet et donc à se retrouver à rallonger d’autant le trajet.

Tentative de retourner sous les téléphériques, tant pis pour la neige. Bien sûr elle est là, sous le soleil, toute molle et impossible à pratiquer même avec nos chaussures à crampons. Le froid alterne avec la chaleur, les nuages avec le ciel bleu, le brouillard avec une superbe vue sur la vallée en bas.

La vue qui n’a pas bougé d’un iota depuis le départ puisque nous montons à flanc d’une montagne dénudée, entourée d’autres montagnes dénudées. La seule vue c’est cette vallée, qui est magnifique pour la première photo, jolie pour le quart d’heure suivant, sympathique à la troisième chute dans les cailloux, « ouais bon c’est une vallée quoi » pour la suite.

L’heure, le déplaisir partagé, la faim (et la non envie de pique-niquer face à cette vallée d’une banalité sans nom) : nous redescendons.

Et autant la neige ne supporte pas le poids de jambes qui poussent pour monter, autant elle tient pas mal pour des glissages en descente ! Du coup le trajet est rapide, les fous-rires garantis et Petite Demoiselle s’éclate comme une folle, nous faisant le cadeau de son rire pour sauver cette partie de la journée.

Pique-Nique au soleil, à la station déserte, et nous rentrons sur Bcharré. Nous reviendrons quand la neige aura fondue, impossible de rester sur une défaite.

Petit arrêt sur la route pour visiter les grottes de la Qadisha (fermées lors de notre premier séjour) : toujours fermées. Le site semble condamné. D’un autre côté le cadenas est un modèle basique, à peine du niveau de ceux pour s’entrainer avec les kits de crochetage grand public. À garder en tête pour le séjour suivant. Il y a bien la menace des alarmes et des caméras ; menace qui semble assez irréaliste sans électricité (et sans les caméras qui ont été démontées par je-ne-sais-qui depuis bien longtemps).

Pour terminer la journée sur un effort plus long, et un paysage plus varié, nous débutons un parcours à Bcharré, qui se termine par une partie de la descente dans la vallée.

Jour 3

Madame a trouvé un parcours qui débute en bas de la vallée (alors oui la route est plutôt pourrie pour descendre en voiture, mais cela m’évite un arrêt cardiaque à chaque passage un peu chaud pour suivre à pied les sentiers sur la falaise quand je vois Petite Demoiselle passer au ras du vide).

Ensuite c’est le chemin plat qui longe la rivière en bas. Tout est en fleur, les odeurs sont agréables, les couleurs attirent notre œil autant que les papillons qui volettent partout.

Nous pique-niquons à l’extérieur d’un monastère et nous décidons de bifurquer pour découvrir un sentier que nous n’avions pas eu le temps de suivre l’an dernier.

Cela s’avérera une voie sans issue (tout du moins sans issue proche du trajet initial pour refaire la boucle) avec une jolie vue et des cultures d’oliviers en terrasse.

Retour sur nos traces jusqu’au monastère, re-descente dans la vallée (Ah ben oui, parce que chaque monastère, ermitage ou grotte ayant reçu l’inestimable visite d’un moine quelconque est en hauteur. Cela doit être un pré-requis. Si tu médites en bord de rivière tu ne restes pas dans les annales !).

Descente ensuite jusqu’à la rivière tout au fond de la vallée. J’admets, c’était juste pour se faire une montée/descente supplémentaire, espérer fatiguer Petite Demoiselle et aller voir l’eau vive au plus près.

Retour à la voiture, la journée se termine et ce haut lieu écologique, interdit aux feux, aux campeurs et à toute activité du genre, voit s’installer les groupes en bord de rivière, avec matériel de camping (catégorie militaire), musique, feux, et certainement du bon « tabac de la Bekaa » si nous nous basons sur le look vestimento-capillaire des jeunes avec qui nous échangeons. (Oui je sais, je suis mal placé pour faire des remarques, c’est pour cela que je me permets).

usMadame et moi-même apprécions ce moment. La loi, les textes, les panneaux c’est ok, mais au final personne ne vient réellement empêcher de s’installer pour la nuit, et nous constatons que ceux qui se prêtent au jeu savent ce qu’ils font. Les foyers sont cerclés de pierres, loin des arbres, les tentes se dressent proches de la rivière sans pour autant être exposées en cas de crue. Il existe encore des endroits où la raison l’emporte sur une application stupide et obtuse (merci Pilote pour le féminin que je ne connaissais pas) des règles. Nous aimons le Liban pour cela aussi.

Jour 4

C’est le moment de repartir.

Bien sûr hors de question de se faire les deux heures trente d’une traite, alors que le soleil brille et que la journée s’étend à l’infini devant nous !

Madame nous trouve (oui ce n’est pas une impression, c’est souvent Madame qui est responsable de proposer des trajets rando) une petite balade sans dénivelé de 2 ou 3 heures sur le parcours qui nous ramène vers la côte.

Le stationnement réserve une petite surprise : des douilles. En les collectant (mais pourquoi faire ???) j’en trouve une plus longue et plus lourde que les autres. Ah ben il y a également des balles non percutée (enfin au moins une, j’ai arrêté mes recherches à ce moment là). Et puis nous ne parlons pas de balles pour carabine de chasse, non, là nous sommes plutôt dans le calibre du fusil d’assaut. Il faudra penser à recommander à Madame d’arrêter de taper le sol avec la pointe métallique de ses bâtons de randonnée.

La vue au sommet (oui, pas de dénivelé pour Madame c’est 400m) permet de poser les yeux sur la montagne enneigée et la mer en tournant à peine la tête. Le lieu idéal pour pique-niquer.

Fin du périple, retour sur Beyrouth.

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