Regarde : le Shouf.

Oui, je sais le titre est lamentable surtout que le verbe regarder s’écrit Chouf (enfin si tant est que l’utilisation d’un alphabet latin soit valide mais si j’écris

شوف

le jeu de mot tombe encore plus à l’eau…). Tout cela pour vous parler de notre dernière virée en week-end dans cette belle région du Shouf.

Suite à nos déboires de réservation (si, si rappelez-vous) de la dernière fois, je me suis décidé à prendre un peu d’avance et à réserver au moins une semaine en avance. Et c’était tout bon, enfin presque puisque le propriétaire du lieu (le gîte de Beit El Qamar) souhaite une réservation en bonne et due forme avec paiement par carte bancaire ou transfert d’argent par OMT (très utilisé localement, une filiale de Western Union je crois puisque le site renvoi également sur les transferts Western Union). Déjà à la base c’est étrange parce que ici tout marche à la parole (sur laquelle personne ne revient). Et bien évidemment OMT est en panne complète depuis la veille m’apprend le gentil monsieur chez qui nous gérons le téléphone, les accès Internet sur le téléphone, l’ADSL et les transferts OMT (qui du coup est passé d’un vague signe de tête fin août à des échanges souriants et curieux à chaque visite). Finalement la panne perdurera (officiellement sans aucun rapport avec l’effondrement brutal de la livre libanaise) et notre hôte accepte une réservation sur engagement oral.

Le taxi est réservé avec un prix plus bas que prévu (tu m’étonnes, le jour du départ la centrale nous annonce qu’ils se sont planté et nous trouvons une entente en coupant la poire en deux) et le vendredi nous voici parti en direction de Deir El Qamar, juste à l’entrée du Shouf.

Le gîte est pas mal, il doit être magnifique en été. Grande terrasse, cuisine/salle de repas pouvant accueillir pas mal de convives (au moins une vingtaine), espace vert central et au fond du jardin un petit cottage (oui c’est le nom donné par le proprio, disons une bâtisse accueillant une immense chambre-salon et une salle d’eau/toilette). Les quelques chambres sont dans le corps principal, mais à la réservation je me suis aperçu que le rajout d’un lit pour Petite Demoiselle dans la chambre revenait à louer le cottage (j’adore ce mot, je m’imagine une maison avec un toit de chaume entre le logement d’un hobbit et la maison de campagne d’un anglais). Et excellent surprise en arrivant : en plus d’une clim’ chauffage il y a un petit poêle à bois dans la pièce. Le premier soir nous n’arrivons qu’à saturer la chambre de fumée, mais le deuxième jour en persévérant un peu (et surtout en nettoyant/démontant le-dit poêle) j’arrive à mettre en route un feu qui remplace avantageusement la climatisation réversible (et qui accroit la sensation de cottage hobbit-anglais (je vous ai déjà dit que j’adore ce mot ?)).

Petite promenade aux alentours (le village est à plus de 30 minutes et vue l’heure cela va être court pour un aller-retour avant la nuit qui tombe encore tôt) et repas au restaurant du gîte. Nous sommes accueillis par Nada, le proprio n’étant joignable que sur WhatsApp pour la réservation. Elle sera charmante et très aidante sur tout le séjour. Elle nous propose un choix de plats typiques, qu’elle prépare en cuisine et qui sont excellents. Un shawarma à la viande, des boulettes végétariennes, des sambousseks (proche des Samosa) à la viande. Nous reprenons même une deuxième tournée de sambousseks et des frites maisons vraiment maison. La sombre ombre au tableau est le prix de la bouteille de vin, nous marquons tellement la surprise que Nada essaie de négocier avec le propriétaire pour baisser la note (ce qui sera refusé). La crise est là, l’inflation aussi, mais là c’était un peu raide. Tant pis, nous avons trop envie de l’apéro du vendredi soir et puis le reste des prix est très corrects. Nous serons seuls au restaurant, les autres convives préfèrent diner dans leur chambre par peur du Covid. D’ailleurs nous ne croiserons que des gens avec masque ici et dans la région. Les cas de maladie sont nuls et tout le monde souhaite que cela reste ainsi.

Samedi direction la randonnée. Madame a prévu de descendre jusqu’au village (Deir El Qamar), de prolonger jusqu’à Beitedine (alors pour l’orthographe j’abandonne, j’ai vu des panneaux avec 3 versions différentes, dans la ville même et je ne vous parle pas des sites web en Français, Anglais et Libanais), puis retour. Les habitants nous recommandent de passer par la vieille route, plus courte et moins roulante.
Enfin non, pour être honnête tout le monde nous demande pourquoi marcher jusqu’à Beitedine alors qu’avec la route il est plus simple de prendre une voiture. Et puis il y a au moins deux heures de marche, peut-être plus avec une enfant. Dans une échoppe où nous achetons de quoi pique-niquer, un ancien semble plutôt penser que c’est plié en 30 minutes…

Ce petit passage en ville nous confirme que tout le monde parle français et très bien, les vieux, les jeunes, les entre-deux (auxquels je persiste à m’associer). D’ailleurs nous constatons que même entre eux certaines personnes se saluent d’un « Bonjour ».

La randonnée démarre donc sur le trajet recommandé. La première partie est plutôt moyenne : il y a des voitures (alors oui peu par rapport à pas mal de route, mais trop pour nous) et ici les trottoirs sont inexistants en ville alors imaginez sur une route entre deux villes. Sans compter que l’absence de limitation de vitesse et l’état des routes poussant les conducteurs à des prouesses de slalom, la vie d’un randonneur ne tient qu’à un fil. Madame trouve un chemin secondaire qui semble nous éloigner de la route et arriver quand même à destination. Malheureusement au bout de 50m à peine un chauffeur de camion nous explique que le chemin n’est pas bon. Sauf que… il est muet et ne semble parler que Libanais (Syro-Libanais pour être exact et me la raconter un peu). Je vous laisse imaginer le jeu des mimes et des échanges entre Madame (moi je me marrais à côté, lâchement) et le chauffeur. Nous capitulons et faisons demi-tour. Le chauffeur avance de 30m, fait marche arrière et nous propose de nous déposer, interloqué par notre refus et notre insistance à marcher. Il fait écho en cela au jeune homme qui s’est arrêté quelques minutes avant, alors qu’il roulait dans le sens opposé à notre marche, et nous a demandé si nous avions besoin d’aide. Il se proposait de faire demi-tour pour nous accompagner, parce que marcher et en plus avec une enfant, c’est forcément un signe de détresse.
Je vous ai déjà dit que les Libanais sont d’une gentillesse exceptionnelle ?

Arrivés à Beitedine (la maison de la foi ou de la croyance en traduction approximative) nous voyons le grand palais. Pas de bol le déconfinement complet est pour dans une semaine, pas de visite… Nous reviendrons.

Pique-nique face à Deir El Qamar et au paysage. Puis départ pour tenter de faire une boucle. Madame ne lâche rien et trouve un trajet pour rentrer au gîte sans passer sur les routes, par des voies secondaires et ensuite à travers colline pour faire le tour de la vallée. En quittant Beitedine nous apercevons un couple qui semble chercher un animal et sifflant et appelant en vain. Il s’avère que leur basset-teckel (le chien de Toys Story) est rentré dans un tuyau d’évacuation d’eau sur le bord de la route (ils n’ont pas de bol, cela doit être la seule route équipée à des kilomètres à la ronde). Petite Demoiselle n’écoute que son cœur et à quatre pattes commence à vérifier chaque tuyau. Elle retrouve le petit chien et nous poursuivons notre marche. (Oui c’est vrai, ce fait divers n’apporte rien du tout à la découverte de la région, simplement je tenais à le recaser quelque part).

Le retour sera plus long, et surtout plus agréable, plus joli et loin des voitures. Presque 17 km dans la journée, une bonne douche chaude, un feu de cheminée, un repas encore meilleur que la veille (le poulet grillé au citron avec les pommes de terre épicées, miam !) et une grosse nuit de sommeil. Avant de se coucher Madame et moi partageons une bière sur la terrasse et nous sommes à quelques mètres d’un bruit dans les fourrés, suivi d’un glapissement typique : des chacals dorés. La faune ici est surprenante.

Dimanche, petit déjeuner traditionnel comme la veille : expresso (ice tea pour Petite Demoiselle, c’est la seule boisson proche d’un fruit sans caféine ou théine), omelette nature, fromage, manouché au zaatar (pizza au thym). Ceux qui me connaissent doivent déjà rire à gorge déployée. Je vous déteste ! Et pour votre information les manouchés sont excellentes (je ne m’étendrai pas sur le reste). Madame a trouvé le tout excellent et pratique pour partir randonner. Petite Demoiselle a géré sans coup férir en négociant en contre-partie une livraison de croissants une fois rentrée à Beyrouth.

La journée est consacré à la visite de Deir El Qamar. Par hasard nous visitons un ancien palais dont une partie (il a été découpé entre différents propriétaires) est le logement d’un homme d’affaire chevalier du mérite français (oui, j’omets volontairement la majuscule, je ne suis pas très médaille) et visiblement bardé d’autres titres (du Vatican et d’ailleurs) tout en étant un musée de cire dédié aux personnages marquants du Liban. Cela va des premiers dirigeants après les Ottomans aux généraux français (oui encore une minuscule, je n’aime pas l’armée et les militaires non plus) en passant par les ministres, présidents, sénateurs, émirs qui ont joué un rôle positif ou négatif dans le passé. Le propriétaire est là et viens nous saluer avec toute la classe d’un ancien charmeur sachant gérer ses relations. Quelques minutes après un très vieux monsieur (pas de retraite au Liban) vient nous proposer ses services de guide (dans un Français excellent). Les mannequins de cire devant lesquels nous étions passés rapidement deviennent vivants à travers ses descriptions, leur rôle, leurs relations, les dates, les actions.

Ensuite nous nous perdons dans les petites ruelles d’une partie de la ville, avec des maisons en pierre, des jardins, un petit labyrinthe plaisant à explorer. Puis ce sera le retour à l’hôtel et le taxi jusqu’à Beyrouth.

Tout cela nous donne très envie de revenir faire une visite plus poussée de la réserve naturelle du Shouf.

Les photos (comme d’habitude en cliquant dessus elles s’affichent en grand avec un commentaire).

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