Envie d’aventure ? Du grand frisson de l’inconnu et de l’imprévu ? Alors en route pour une attraction originale : se déplacer au Liban.
Le Liban est un petit pays, 10.000 km2, quelque chose qui peut rappeler la Corse (en taille et en forme). Un aéroport international et deux aéroports militaires donc aucun vol intérieur (ce qui n’aurait de tout manière aucun intérêt puisqu’il faudrait plus de temps pour embarquer que la durée du vol).
Depuis la guerre il n’y a plus de voie ferrée, ce qui permet de s’affranchir des retards et annulations qui font tout le sel de la vie du voyageur SNCF.
Comme le pays possède une longue côté, que les grandes villes sont portuaires, la solution évidente est le cabotage. Gagné ? Perdu ! Aucun transport maritime n’est en place. Il semble qu’il y aient eu des tentatives dans le passé, sans succès (les mauvaises langues sous-entendent que l’absence de succès est liée à des soucis administratifs plutôt que fonctionnement. Monsieur n’a pas d’avis sur le sujet et préfère ne pas prendre position, il se la joue Suisse sur le coup.).
A Beyrouth il n’existe pas de tramway et à constater la largeur de la plupart des voies, je ne pense pas que cela soit réalisable de manière satisfaisante. Pas de métro non plus, et là entre l’état de certains immeubles, la richesse archéologique des sous-sol de tout le pays et la proximité de la mer, je ne pense pas qu’il puisse voir le jour dans un avenir proche.
« Ben alors on se déplace comment ? Parce que là tu listes que des trucs négatifs, c’est nul comme pédagogie ! »
Les bus
Il existe un service de bus de ville (deux ou trois en fait) et un service de bus inter-villes. Je n’avais connaissance que de la ligne vers le nord (Beyrouth – Tripoli) et en préparant cet article j’ai découvert que d’autres lignes étaient proposées. Aucun site officiel n’existe pour regrouper toutes ces informations, et une initiative collaborative a vu le jour : http://busmap.me/
Les tarifs des bus sont très abordables, les mini-vans en ville sont à 1000 LL (une dizaine de centimes au cours du 4 octobre). Les horaires sont au mieux aléatoires puisque ce service fonctionne comme un taxi : vous faites signe pour monter et vous demandez pour descendre. Entre la circulation et les arrêts permanents, le trajet a une durée imprévisible.
Madame, Petite Demoiselle et Monsieur n’ont pas encore tenté l’aventure des trajets longue distance (enfin façon de parler, ici les trajets se mesurent en durée plus qu’en distance, puisque Batroun – Beyrouth c’est 45 minutes tôt le matin sans circulation et une heure trente au moins le dimanche soir à 18:00). Nos amis Libanais nous ont recommandé de ne prendre que les « gros » bus et pas les mini-vans en dehors de Beyrouth. Le taux d’accident de ces derniers est trop élevé.
La voiture et les deux roues
Les trois moyens de déplacement les plus utilisés sont le scooter, la voiture individuelle et le taxi. Les scooters sont partout ici, les motos beaucoup plus rares et surtout des petites cylindrées (200 et 400 cm3). Les scooters (comme les motos) se pratiquent sans casque, sans gant, régulièrement sans éclairage. Le sens de circulation (ie les sens uniques et les sens interdits) n’influe en aucune manière la circulation des scooters. De toute manière avec le portable dans la main et les yeux sur WhatsApp, la lecture des panneaux passe au second plan. Les livreurs parcourent la ville, généralement à l’intérieur du même quartier, pour apporter des bouteilles d’eau, des repas, des courses, tout ce qui tient sur un scoot.
La conduite de sa propre voiture parait juste impossible. Puis, avec un peu d’habitude et beaucoup de discussion avec des amis, cela devient envisageable. Les feux rouges, la priorité à droite, les stops, le nombre de files, les sens interdits et même la présence de policiers, ne sont que des indications susceptibles d’être prises en compte par les conducteurs autour de vous. Cela parait chaotique, et soyons clairs cela l’est réellement. Tout ce chaos a son corolaire : tout le monde est très très attentif et avec un peu de culot il est tout à fait possible de se mêler à la folie sans prendre de gros risques.
Taxi !
Et enfin il reste les taxis. Je n’ai jamais vu autant de taxis dans une ville, même à NY. Les taxis ont trois modes de fonctionnement, au choix des circonstances et du chauffeur : chauffeur dédié, taxi et service.
Le chauffeur dédié c’est la réservation du taxi pour la journée. Vous vous mettez d’accord sur le tarif, l’heure de prise en charge, l’heure de retour et une idée de la destination. Selon la distance prévue sur la journée, votre relation avec le chauffeur (quand vous avez un bon feeling avec quelqu’un il est aussi simple de faire appel à lui par la suite) et votre capacité de négociation le tarif peut tourner autour des 250.000 LL (25 à 30 euros). L’avantage c’est de pouvoir faire de multiples arrêts (pour des visites de lieux proches par exemple) sans vous soucier de trouver à chaque fois un taxi sur place.
Le taxi ben c’est … le taxi quoi ! Le même que partout ailleurs. Ah si, une petite particularité (nous sommes au Liban, tout est particularité) : pas de compteur. Tout se négocie au moment de monter dans le taxi. Il y a quelques compagnies globale (« Allo Taxi » par exemple) où le tarif est fixé à l’avance, cela reste l’exception. Même Uber, de ce que j’ai compris (puisque je refuse viscéralement d’utiliser ce service néo-esclavagiste), ne fonctionne pas ici comme en Europe ou aux USA. C’est juste une mise en relation, le tarif va dépendre de la distance, de la durée (les bouchon encore et toujours) et de la négociation. Le paiement se fait en liquide auprès du chauffeur et pas par CB auprès du site Internet. Pour traverser la moitié de la ville le tarif peut se situer (notez le conditionnel, je ne suis pas responsable de vos déceptions) dans les 25.000 LL (3 euros).
Enfin il existe une manière très locale de prendre un taxi (ce sont les mêmes véhicules, les mêmes chauffeurs) : le service. Lorsque vous marchez dans la rue, tous les 30 mètres (encore moins si vous avez un look et/ou une démarche vous désignant comme touriste) un taxi vous klaxonne (sur un mode différent du klaxon pour avertir le piéton qui traverse sans regarder qu’il va passer sous les roues, du klaxon signalant au véhicule devant de ne pas changer de file, du klaxon qui … vous avez compris le principe), et ce taxi (relisez le début de la phrase) a déjà des passagers. C’est quoi l’idée ? Et bien l’idée c’est de grouper les clients qui iraient sur un trajet plus ou moins commun. Tarif réduit (et fixe) pour les clients et optimisation du déplacement pour le taxi.
Le tarif était de 2000 LL, avec l’inflation il est de 3000 LL (30 centimes) par personne. Les enfants ne payent pas toujours leur place, mais à moins de le négocier en Libanais dans le texte ne comptez pas sur cette remise. Si le trajet est trop long (plus de deux quartiers par exemple) ou s’il est très tard, le chauffeur peut négocier un double-service.
Nous adorons ce mode de déplacement. Cela n’a aucun rapport avec le coût (3×3000 voire 2x3x3000 pour un double, c’est aussi onéreux qu’un taxi dédié) et tout avec les rencontres. Dans un service les gens échangent, sont curieux (surtout avec des Français qui annoncent s’être volontairement installés dans un pays que beaucoup de Libanais cherchent à quitter) et vous aident à discuter avec le chauffeur si besoin pour expliquer votre destination. Compléter votre vocabulaire en Libanais, vous faire indiquer un magasin inconnu des guides et pourtant immanquable, croiser des personnes tellement différentes les unes des autres : prenez un service !